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LE FILM D’ANDRÉ MALRAUX : SIERRA DE TERUEL (G. Altman, 1939)

Publicada el septiembre 8, 2025septiembre 14, 2025

Du cinéma comme on n’en voit pas souvent. Georges Altman

LA LUMIERE -18.8.1939 (La lumière sur l’écran) Page 5

(Images : photogrammes du film)

 

La vie se tait et la mort fait du bruit. Quel calme dans ces villages où l’ombre est sœur du soleil, règne à côté de lui par les ruelles, sous les porches, derrière les volets, tandis qu’éclate, fixe, écrue, la blancheur de la chaux des maisons et des tours d’églises ! Quelle paix l’été impose à cette nature ! On s’attend aux cloches, aux bruits lents de la campagne, à l’écho d’un chant, au grincement d’une charrette, aux grains de l’heure qui tombe, vannés par l’espace.

Il n’y a comme bruit que les coups pressés des canons et l’éclatement des bombes.

Aux premières images du film qu’André Malraux a tiré de son livre L’Espoir sous le titre Sierra de Teruel, il semble que le silence lumineux, ordonné de la vie domine le désordre des bruits de la guerre.

Ainsi, ce qu’il y avait d’admirable dans le livre, cette vie éternelle des saisons et de la nature, baignant la frénésie humaine, on le retrouve transposé par Malraux lui-même dans une œuvre d’écran, tournée en pleine guerre civile, avec des moyens de fortune, quelques acteurs, le ciel et le peuple d’Espagne, le talent d’un opérateur, Page, mais qui comporte quelques-unes des plus hautes minutes d’émotion dont soit capable l’art du film.

Séquence VIII

Il n’est pas question ici d’épopée, de tableaux de bataille, de violence à panache. Sierra de Teruel n’est pas un film de guerre ; c’est le film où la guerre subie et menée avec rage par un peuple en espadrilles et aux poings nus, dressé contre des tanks, montre sa déchirante et sublime gageure : sans avions, sans canons, sans munitions, un peuple de paysans assaillis par les militaires se défend et « apprend » la guerre en même temps qu’il la fait.

Des gens de métier contre des gens de villages, et huit avions modernes contre deux vieux « zincs » … Vous comprenez bien que cela ne peut « inspirer » un film de guerre, comme on l’entend… Il faut qu’il y ait autre chose pour que Sierra de Teruel touche parfois le sublime, et que Malraux n’a pas inventé, qu’il a su voir et dire. Quelque chose qui appartient au meilleur de l’homme, à la vie, à la terre, bien plus qu’à la mort et à la guerre. Ce dilemme, être ou faire, que posait L’Espoir sans le résoudre les images du film le font vivre sur les visages de ces hommes simples qui, jetés dans la guerre, conservent leur moi profond, leur être paysan adapté tant bien que mal à ce que la nécessité de défense commande de faire. Des héros, mais qui tuent la fausse idée d’héroïsme et la gloire du soldat : toute guerre est atroce, et Sierra de Teruel, à l’encontre des films où les hommes se battent, n’exalte rien que la conscience et que la vie broyée, vaillante et fraternelle des pauvres. Les soldats, les agresseurs ? On ne les voit pas. C’est la brute anonyme contre laquelle palpite un peuple. Ainsi dans la célèbre toile de Goya où des soldats fusillent des paysans à la lueur tragique des lanternes, ne voit-on pas le visage des fusilleurs en uniforme, mais seulement le visage de ceux qu’on tue, des hommes. La gloire et la défaite du peuple d’Espagne, c’est d’avoir été l’homme en défense contre le militaire. La guerre n’offre pas de panorama dans Sierra de Teruel, ni de troupes en marche, ni de masses soulevées ; si l’écran se peuple, c’est, par exemple, la houle d’un grand troupeau de moutons que le soleil et l’ombre peignent de lueurs douces et que le crépuscule emporte vers d’autre horizons, sans doute où la guerre ne tonne pas ; quand l’écran s’agrandit, c’est pour la lutte solitaire de l’avion et les nuages, et la terre vue à vol d’oiseau aux yeux d’un paysan effaré de l’espace.

Séquence XXXIX

Pas de pittoresque, et rien que des mots, des moments essentiels : l’effort d’un petit groupe d’Espagnols pour faire sauter un pont tenu par les rebelles, la patiente randonnée de l’officier républicain qui cherche en vain des voitures pour baliser le terrain d’où l’avion doit s’envoler, le raid sur le champ d’aviation rebelle, la fin de l’avion, et la descente des blessés et des morts à travers les montagnes, et la foule de partout surgie, puissante marche funèbre, scandée par le cahot des mulets porte-cercueil, la musique de Milhaud, la lente avalanche en relais d’un peuple uni aux rocs, qui accompagne, salue et couve ses morts.

Vraiment, les paysans d’Espagne, dans l’Espoir comme dans Sierra de Teruel, lumières et ombres portées du livre sur l’écran, ils parlent avec cette laconique noblesse, et vivent avec cette pureté que nous transmet la légende d’une paysanne guerrière d’ici, Jeanne d’Arc ; c’est dans l’âme paysanne des peuples du monde que se découvre en dépit des fragiles frontières, l’identité des hommes.

On ne peut faire que ce qu’on peut : se tasser dans l’enfoncement des portes quand les tanks glissent avec leurs fusées de mort à travers la ville, et puis aussi courir, grenade en main, insectes humains, cibles mouvantes à travers la campagne, dans l’alerte et le tir inexorables de mitrailleurs casqués. Il faut des phares, des autos. À travers les villages nocturnes, de comité en comité, tandis que des guitares mêlent un souffle au crépitement des feux, le chef poursuit sa quête et bientôt, le champ s’allume de phares pour l’envol d’un avion qui prend dans sa carlingue un paysan. Celui-là, qui connait l’emplacement d’un terrain rebelle et qui doit guider le pilote, il n’a jamais volé, il n’a jamais connu la terre qu’en marchant dessus en se courbant sur elle, en y collant la mesure humaine du corps et des maisons. « Décoller », ce mot technique, comme il exprime bien alors, pensions-nous devant ces images, sommet du film, l’arrachement de l’homme pour la première fois emporté dans l’espace, « décollé » de sa terre qu’à vol d’oiseau, soudain éperdu, il ne sait reconnaître.

La terre, c’est la ? ces traits, ces raies, ces filets, ces plans et ces carrés où tout se confond et se durcit, où la montagne perd ses rondeurs, la vallée ses courbes, le fleuve sa coulée et le village sa vie ? Rien ne vit plus, aux yeux du paysan dans la carlingue, qu’un domaine qui n’est pas sien, celui des nuages que l’avion rejoint et qu’il ne reconnait pas non plus, vus de si près. Perdu, entre sa terre qui n’est plus la même et le ciel étranger, exilé dans l’espace.

Sur ce thème unique, comprend-on combien l’art du film peut nous imposer ici son lyrisme le plus direct et le plus vaste ? Ces images de Sierra de Teruel, où l’avion vole avec son paysan perdu et réticent devant l’espace, chantent

Séquence XXXIV

vraiment un hymne inoubliable à la terre, au rêve et au cœur de l’homme. Il n’a point peur, certes, le rustique Icare, que les aviateurs pressent de questions hurlées à travers le bruit des moteurs : « Est-ce là ? Te reconnais-tu ? Dis-nous vite ! » Il n’a point peur, il ne comprend pas, il ne voit les choses de la terre que sur la terre, près des nuages, il ne sait être que ce qu’il est et sa victoire subite, sur lui-même, ce sera tout d’un coup, tremblant de joie, de reconnaître à temps, enfin ! le champ rebelle ; la tâche à remplir l’avait fait sortir de lui-même. C’est là. Et les fuseaux d’acier rapides, s’éjectent puis, d’un trait, éventrent le sol et les hangars. La fumée se mêle aux nuages. Le raid a réussi.

La « chase » rebelle arrive. Combat. L’avion est tout seul contre l’escadrille. Tout crépite, tout tangue, halète dans le coin de ciel où l’on se bat. Suer le « manche à balai » crispé par le pilote, une fourmi lentement glisse, venue de la vie. La mitrailleuse fait ses spasmes mécaniques. Et venus d’un autre coin de ciel, venus de la vie allant vers la vie, un grand vol régulier d’oiseaux glisse au-dessus des hommes, tandis que l’un d’eux, tout en tirant, sourit à l’autre : « Tu vois ! Déja les migrations… » Harmonieuse cadence des saisons et des oiseaux jetant un furtif arc-en-ciel au plein cœur de l’orage…

C’est fini. Un long piaulement, et l’énorme massue du roc qui cogne sur la machine. L’avion blessé s’écrase. Silence. La chasse regagne sa base. Les oiseaux l’horizon. Dans le petit poste des républicains, un enfant joue à l’oiseau et à l’avion, élevant ses petits bras, cependant que le téléphone annonce : « Ils sont tombés. »

Par le chemin qui sinue à travers les montagnes, c’est la descente au milieu du peuple des villages qui semble alors se transmettre ses blessés et ses morts, d’une foule a l’autre. Si grande soit cette fresque mouvant du convoi, du peuple né des rocs et du ciel vaste y compose la plus poignante des « thrènes », l’hymne de deuil et d’espoir d’un peuple, l’image ici nous semble inférieure aux pages étonnantes du livre de Malraux, chantant cette descente des paysans à travers la montagne ; l’expression écrite donnait un lyrisme de poème, une cadence superbe là où l’image se disperse un peu dans le détail « documentaire », réduit le souffle. Ce film exalte l’évocation de la nature, du ciel, des nuages, d’un vol d’oiseau, comme dans le passage de l’avion, mais limite forcément la vision profonde du peuple paysan telle qu’elle surgit à la fin de l’Espoir.

Mais bien sûr, nous en avons assez dit pour montrer que Sierra de Teruel n’est point un film comme les autres. C’est sans doute le seul document lyrique qui restera sur cette lutte d’un peuple.

Georges Altman.

𝙎𝙄́𝙂𝙐𝙀𝙉𝙊𝙎 𝙔 𝘾𝙊𝙉𝙎𝙀𝙂𝙐𝙄𝙍𝘼́𝙎: 𝙉𝙀𝙒𝙎𝙇𝙀𝙏𝙏𝙀𝙍 𝙈𝙀𝙉𝙎𝙐𝘼𝙇 / 𝙋𝘿𝙁𝙨 / 𝙎𝙊𝙍𝙏𝙀𝙊𝙎 𝙏𝙍𝙄𝙈𝙀𝙎𝙏𝙍𝘼𝙇𝙀𝙎

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